Accueil | La Bible | Etudes bibliques | Portraits | Confessions de foi | A méditer | Liens |
C'est une idée étrange de chercher la vérité dans le passé alors quand pour nos contemporains, la vérité se cherche dans la dernière version parue.
Pourtant depuis que l'être humain inventa l'art d'écrire, on trouve l'idée que les dieux aussi savent écrire et envoient, à des humains capables de déchiffrer leurs messages, des révélations concernant l'univers, le destin, le présent et l'avenir. Ainsi est né en Mésopotamie la lecture dans les étoiles, à l'origine de l'horoscope et de l'astrologie moderne, comme toutes ces types de divination dont les peuples de l'Antiquité usent et abusent pour connaître le désir des dieux.
Les textes bibliques, notamment ceux du Lévitique (chapitre 20) ou du Deutéronome (chapitre 18), assimilent ces pratiques divinatoires à de la magie sévèrement condamnée. On peut même dire que la Bible, dont certains textes se présentent comme révélés par Dieu, se méfie de tous ceux qui prétendent à une connaissance surnaturelle de Dieu ou du monde. Elle-même se présente d'abord comme un texte à lire et à comprendre avant que de croire.
Ainsi en va-t-il de ce qui dans l'imaginaire judéo-chrétien pourrait apparaître comme le texte révélé par excellence et que nous connaissons le plus souvent sous l'appellation des dix commandements. A la seule lecture de cette expression, nous nous représentons un texte gravé par le doigt même de Dieu sur les tables de pierre confiées à Moïse. Le texte hébreu de la Bible évoque d'une part les paroles dites par YHWH à Moïse (Exode chapitre 20, verset 1), sans qu'il soit alors question d'écriture. Plus tard, d'autre part (chapitre 24, verset 12 et chapitre 31, verset 18), nous est rapporté que YHWH donne à Moïse des tables de pierre écrites par Lui. Malheureusement rien ne nous est dit alors du contenu de ces tables qui seront brisées par Moïse à la suite de l'épisode du veau d'or (chapitre 32, verset 19). L'expression "décalogue" n'apparaît dans le texte biblique qu'en Exode chapitre 34, verset 1 à propos de la copie des premières tables, copies faites de la main de YHWH ou de celle de Moïse selon le verset 28 du même chapitre, mais copie dont le contenu ne nous est pas transmis. Ainsi donc, quand un texte est donné, la Bible se garde de nous dire qui l'a mis par écrit (Exode, chapitre 20). Quand YHWH écrit ou dicte un texte à Moïse, le contenu de ce dernier ne nous est pas transmis. Tout se passe dans ce qui pourrait être le texte écrit et signé par Dieu lui-même, comme si la Bible se refusait à faire le pas, refusant de laisser croire qu'on peut directement avoir accès à la parole de Dieu figée dans l'écriture. Dieu parle et parce que sa parole parvient aux hommes par l'intermédiaire d'un humain, cette parole n'est pas seulement un ordre auquel il faut obéir ou une vérité à laquelle il faut croire dans les termes mêmes où elle est formulée mais elle demeure une invitation à entendre ; à comprendre et à traduire.
De même, pour le Nouveau Testament, Jésus n'a rien écrit si ce n'est sur la poussière du sol (Jean chapitre 8, verset 6). Quatre hommes ont pourtant pris la plume pour écrire et transmettre les parole du maître. C'est de la pluralité et de la cohérence de leurs témoignages que naît notre liberté de croire aujourd'hui.
Jean-Pierre STERNBERGER
Nota Bene : une lecture attentive du Coran, et notamment de la Sourate 17 (verset 105-106), selon laquelle le Coran apparaît à la fois le livre descendu du ciel et l'ensemble de ce qui a été dit tout au long de sa vie par le prophète, me laisse entendre que, même s'il confère à l'écrit un caractère sacré bien plus marqué que la Bible ne se donne à elle-même, l'Islam n'a pas totalement éliminé toute trace d'une transmission humaine de sa révélation.